Copie d’écran JT National France 3

 

Le billet de Bernard Dusept

 

Pour le lieu, cette région, que je connais par cœur, est appréciée des expatriés vivant à Niamey qui viennent voir et photographier des troupeaux de girafes (de la sous espèce sahélienne) qui ont toujours vécu dans cette zone du Niger pas très éloignée du fleuve.

 

Jusqu’au début des années 90, ces troupeaux étaient plus en amont entre Niamey et le frontière avec le Mali, où tout le monde allait les voir ; les paysans locaux les laissant en paix car ayant compris que les « toubabs » rapporteraient plus d’argent en rémunérant les enfants qui guidaient en tout terrain les visiteurs, que d’abattre et vendre deux ou trois tonnes de viande.

Le déplacement 150 kilomètre plus en aval, près du parc du W, a permis à l’état Nigérien d’organiser les visites et de remplacer les jeunes villageois par des gardes assermentés et ainsi de faire payer un droit de visite.

Chacun sait donc, djihadistes inclus, par où exactement passent les visiteurs et où ils circulent dans la zone de vision.

Cette région se situe en plus dans le triangle des 3 pays : Niger, Benin et Burkina Faso avec des frontières très perméables et des routes secondaires sans aucun poste de contrôle douanier ou policier. Il m’est arrivé souvent de passer ainsi du Niger au Burkina sans pour cela avoir à subir un quelconque arrêt.

Il faut noter aussi un antagonisme certain entre les populations locales et les gardes forestiers. Lors d’un séjour dans la partie voltaïque de la réserve du W, un garde m’accompagnait dans ma Land Rover pour regagner le campement de DIAPAGA ; nous avons croisé un peulh qui circulait à pied dans la réserve : le garde m’a fait stopper la voiture, a visé avec sa carabine de fonction et a tiré (à 200 mètres environ) sur cet individu sans sommation. Il l’a raté me disant en rigolant qu’il avait eu de la chance ; il est vrai que la semaine auparavant des braconniers avaient tué 3 gardes !!!

Les villages autour de ces zones sont hostiles à la présence des gardes qui les empêchent de tuer la viande (antilopes, buffles) dont ils ont besoin pour se fournir en protéine.

L’assassinat, ce dimanche, du chef des gardes n’a pas soulevé par là-bas une indignation générale dans les villages près de la zone.

Le moment a été bien sûr calculé en fonction de la présence potentielle des expatriés. C’est le week-end et tout particulièrement le dimanche que les européens se rendent sur place ; le samedi étant consacré aux courses. Donc en patrouillant un dimanche matin, les terroristes avaient toutes les chances de rencontrer des cibles intéressantes, cela d’autant plus que les touristes ayant déserté le Niger, ils ne pouvaient compter que sur des visiteurs vivant à Niamey.

Les réservations de visite étant plus que fortement recommandées pour retenir un guide, la visite de ce groupe était donc connue par de nombreuses personnes. Ce n’est pas anodin si c’est le chef des guides qui les accompagnait. Cela sous-entend qu’il n’y avait pas ou très peu d’autres visiteurs ce dimanche-là, le responsable des guides ayant choisi d’accompagner la première voiture (pourboire oblige). Et cette information les djihadistes la connaissait.

Il leur aura suffi de se renseigner auprès de l’administration du parc soit directement soit avec les petites mains pullulant autour : vendeurs de souvenirs, de boissons etc.

Les terroristes qui se sont préparés avec minutie, ont attendu un week-end non pluvieux car en ce moment, c’est la saison des pluies dans le sahel. La pluie les aurait considérablement gênés car il est difficile de rouler dans la boue en moto et cela laisse des traces !!!

Regardez le sol autour de la TOYOTA calcinée : il est sec !

La méthode est excellente : à moto, on passe partout et il est facile d’apparaître, d’attaquer et de s’enfuir.

Avez-vous remarqué qu’il y a plus de femmes que d’hommes chez les victimes dans cette ONG ; ce n’est pas non plus un hasard : les ONG privilégient les femmes comme vecteurs de leurs actions car celles-ci sont plus à même d’établir des contacts avec les populations locales et évitent beaucoup de conflits et représentent une vitrine moins « guerrière » et plus douce.

L’étrange sensation de sécurité avait envahi la communauté européenne de Niamey, renforcée par la proximité. Les terroristes ont été là pour confirmer qu’on ne peut faire disparaître le danger qu’en l ‘éradiquant, ce qui est impossible à faire dans cette région du monde.

En milieu de plus en plus hostile, le Français expatrié dans le Sahel met sa vie en jeu en étant assimilé à une force d’occupation similaire à l’opération Barkane.

 

Il y a tellement à faire dans notre pays en opérations d’assistance, qu’il est inutile d’exposer sa vie en Afrique de l’ouest. Mais, malheureusement, un emploi dans une ONG dans ces régions fait bien dans un CV, si toutefois il reste de l’avenir !

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