Le billet d’Éric de Verdelhan

 

« Le jour où la France coupa la tête à son Roi, elle commit un suicide. »

(Ernest Renan, philosophe et écrivain.1823-1892)

« Maintenant que j’ai le temps de méditer, je me demande si l’erreur initiale de la France ne date pas de l’exécution de Louis XVI. » (Raymond Poincaré, président de la république. 1860-1934)

 

Détruire le Catholicisme en France était, pour la Franc-maçonnerie, une chose relativement facile. Il suffisait d’agiter le chiffon rouge pour qu’une partie du bas peuple, pauvre et affamé, veuille se venger de la richesse, de la puissance et de l’arrogance du haut clergé.

Il aura suffi, ensuite, d’assortir cette haine de l’Autel de décisions aussi ridicules qu’inutiles, décisions qui d’ailleurs ne survivront pas à la Révolution : imposer un calendrier républicain, pour supprimer les fêtes chrétiennes, était parfaitement stupide. Transformer la Cathédrale Notre Dame de Paris en « Temple de la Raison » était, en revanche, un sacrilège… encouragé par les Loges.

Mais, depuis la prise de la Bastille, toutes les surenchères étaient permises : le conventionnel Rühl brise la Sainte Ampoule dans la cathédrale de Reims. On change le nom des villes si ce nom fait référence à un saint : Saint-Malo, par exemple, devient Port-Malo, Saint-Denis devient Franciade…

Et on va beaucoup plus loin dans l’abject. Ruault écrit : « On a creusé à Saint Denis, une grande fosse dans laquelle on a jeté pêle-mêle tous les ossements des rois, des princes et des princesses… ». Cet épisode peu connu de la furie révolutionnaire mérite qu’on s’y attarde, même s’il est parfaitement répugnant. Personnellement, je l’ai découvert il y a quelques années déjà, en lisant « Sire » de Jean Raspail (1) : « Le 6 août 1793, l’église (de Saint Denis) grouilla soudain de soldats à bonnets rouges, d’ouvriers armés de pics, de masses, de marteaux, de leviers. La foule les encourageait … En septembre, dans l’abbatiale mutilée, on martela ou on fit sauter au ciseau les derniers attributs de la royauté qui avaient encore échappé à la fureur républicaine …Firent leur entrée ces spoliateurs de tombeaux, ces hommes abominables qui eurent l’idée de violer l’asile des morts et de disperser leurs cendres. C’était le 12 octobre 1793 … Au milieu d’une foule surexcitée on commença à creuser deux fosses carrées. La première était destinée à recevoir les ossements des Bourbons, la seconde ceux des Valois et des Capétiens directs … Puis l’on enfonça au bélier les portes des caveaux… » J’épargnerai à mes lecteurs une dizaine de pages de détails peu ragoûtants.

Raspail raconte que la profanation des tombeaux de nos Rois ne s’avéra pas florissante : « Nos princes s’étaient le plus souvent couchés dans leur tombeau en chemise, sans bijoux ni attributs royaux, en signe d’humilité chrétienne. Le total de la collecte donna onze couronnes de vermeil ou de cuivre doré, onze sceptres de même métal, quatre mains de justice en argent, trois anneaux dont un seul en or … ».

La fosse commune des Bourbons a été fermée le 16 octobre 1793, celle des Valois et autres souverains le fut le 25 octobre. Ainsi fut consommée la seconde mort de nos Rois. Il restait aux valeureux fils du peuple à rendre compte à la Convention de l’accomplissement de leur mission. Ils y allèrent en délégation. En tête marchait, titubant, Pollart, maire de Franciade (nouveau nom de Saint-Denis), curé défroqué. Le suivaient, assis sur des ânes auxquels on avait enfilé, sous les rires, des chasubles et des étoles, des employés municipaux aussi éméchés que leur maire. Parvenu à la Convention, le maire Pollart hoqueta un discours d’ivrogne « Citoyens … nous vous apportons toutes les reliques puantes et les pourritures dorées qui existaient à Franciade. Nous vous prions de nous en débarrasser sans délai, pour que le faste catholique n’offense plus nos yeux républicains… ».

Hormis ce qui disparut dans quelques poches, tout fut fondu. N’en réchappa que le sceptre de Charles V qui tapa dans l’œil d’un conventionnel au fanatisme tempéré par le goût.

Mais, puisqu’on avait pris l’habitude de « bouffer du curé » et de tuer « la superstition », il eut été dommage de s’arrêter en si bon chemin ! On avait commencé, le 4 novembre 1789, par la confiscation des biens du clergé, puis la Terreur avait détruit les temples et tué bon nombre de curés « non-jureurs ». L’œuvre de déchristianisation de la France était en marche, elle n’allait plus s’arrêter.

C’est d’abord Émile Combes, Franc-maçon qui doit ses brillantes études aux institutions catholiques et qui, par la loi du 7 juillet 1904, interdit aux congrégations d’enseigner. Il fait fermer, en quelques jours, 2500 écoles religieuses. C’est le général André, qui, le 4 novembre 1904, est giflé à la chambre par le député nationaliste Syveton ; point d’orgue de l’ « affaire des fiches », dans cette « république des Francs-maçons » (on évaluait à 30 000 le nombre des Francs-maçons dans les instances politiques, parmi lesquels 250 députés et 200 sénateurs).

Le général André, pour favoriser l’avancement des officiers républicains ET anticléricaux, fait ficher les officiers : sont-ils catholiques ? Ont-ils envoyé leurs enfants dans des institutions religieuses ? Etc… 20 000 fiches sont ainsi établies et transmises au Grand Orient de France, fer de lance de la lutte contre l’Eglise. Le scandale sera énorme. Beaucoup d’officiers indûment promus (dont presque la moitié des 425 généraux !) seront alors limogés.

Le général André dut démissionner et, après lui, le gouvernement Combes. C’est la loi de séparation de l’Église et de l’État, d’Aristide Briand, le 9 décembre 1905 et le scandale des inventaires qui se dérouleront dans un climat de guerre civile. L’apaisement ne viendra qu’après la saignée de la Grande Guerre, avec l’ « Union Sacrée ».

C’est la scandaleuse condamnation de l’Action Française par Pie XI, le 25 décembre 1926 ou, plus exactement, l’interdiction faite, en 1927, aux adhérents de l’A.F, de recevoir les sacrements de l’Église. Ce drame va déchirer des familles et troubler les consciences mais il était parfaitement orchestré puisque, en dissociant le Trône de l’Autel, il interdisait toute possibilité d’un retour de la monarchie en France. Cette condamnation sera levée par S.S.Pie XII en 1939, mais le mal était fait : la blessure était profonde, elle ne cicatrisera jamais totalement.

C’est le Concile Vatican II, commencé sous Jean XXIII en 1962 et clôturé sous Paul VI en 1965, qui va prôner l’œcuménisme, abandonner le rite tridentin et le latin – langue universelle de l’Église – provoquant une forte crise des vocations et, en corollaire, une désertification des séminaires, des couvents et… des églises. Ce sont les abus, les excès, les abandons liturgiques d’après Vatican II, qui vont amener la rupture entre les « traditionalistes », sous l’égide de Monseigneur Marcel Lefebvre, et le courant progressiste de l’Église. Monseigneur Lefebvre, fondateur de la Fraternité Saint Pie X, sera d’abord « suspens a divinis » en juillet 1976, avant d’être excommunié le 30 juin 1988. Cette excommunication a été tardivement levée (le 21 janvier 2009) par S.S. Benoît XVI ; qu’il en soit remercié ! Je ne peux que conseiller la lecture de sa « Lettre ouverte aux Catholiques perplexes » (2) qui est un modèle de lucidité, de clairvoyance et de foi chrétienne.

C’est encore le retour en force de l’Islam, qui, dans notre ancien empire colonial, reprend le terrain jadis conquis par le Catholicisme. Comme « un clou chasse l’autre », le recul du Catholicisme se traduit aussi par une montée en puissance des sectes, en métropole mais aussi dans nos anciennes colonies (Cf : les Evangélistes américains en Afrique : sous couvert de religion, c’est une nouvelle colonisation qui s’instaure …), et la métropole devient elle aussi, peu à peu, terre d’Islam.

Et puis, la morale n’étant plus chrétienne, les idéaux maçonniques débattus en Loges arrivent à l’Assemblée Nationale : ainsi de la « Loi Veil », en 1975, autorisant l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG). On légalise le droit de tuer l’« infans conceptus », cet « enfant à naître » qui a des droits depuis la plus haute antiquité. Depuis la loi Veil, on a tué en France environ 220 000 fœtus par an (chiffre officiel communiqué par les pouvoirs publics) soit en gros 9 millions de bébés.

En 1981, la France abolit la peine de mort sur pression de Robert Badinter, le garde des sceaux de l’époque, et nous arrivons à cette aberration : en France, on n’a plus le droit de tuer que …des innocents (3).

Dans un article déjà ancien, j’écrivais : « A force de tout accepter, tout expliquer, tout admettre, tout excuser (sauf d’être franco-français, hétérosexuel et catholique), on récolte ce que l’on a semé : accepter l’avortement hier, c’est accepter le mariage « Gay », l’homoparentalité aujourd’hui, l’euthanasie demain, la pédophilie après-demain et pourquoi pas l’inceste et la zoophilie ? ».

Nous sommes LE pays des « droits de l’homme » : laxisme, permissivité, suppression du respect, « incivilités », agressions de personnes âgées, d’enseignants etc.… sont devenus notre lot quotidien. Mais, après tout, la France ne récolte que ce qu’elle a semé !

On me dit que le « Nationalisme intégral » – la monarchie – n’est plus possible de nos jours. Qu’aucun prétendant au Trône n’est crédible et/ou digne de régner. Qu’on me permette d’en douter et de faire davantage confiance à un Roi d’émanation divine plutôt qu’à un petit Marquis poudré, formaté par l’ENA (et le GODF), pantin de la finance apatride.

Même si le citoyen français est appelé aux urnes en gros tous les 18 mois, et souvent sur des sujets (comme la Constitution Européenne) dont il ne connaît rien, les hommes politiques ne jouent plus l’intérêt suprême de la nation mais leur réélection. Ces messieurs vont à la soupe, alors que la « res publicae » devrait être un véritable sacerdoce. Par démagogie ou clientélisme électoral, ils acceptent tout, au nom de la sacro-sainte liberté. Une liberté qui n’implique plus aucun devoir, seulement des droits individuels. « La liberté du fou s’appelle folie, celle du sot, sottise, celle du bandit, banditisme, celle du traître, trahison, et ainsi de suite… » disait Charles Maurras.

J’ai envie de rajouter que celle du con s’appelle connerie et qu’elle est en train de prendre le pas sur toutes les autres ! « Liberté, que de crimes on commet en ton nom ! » Cette citation célèbre de Manon Roland, avant de monter sur l’échafaud, reste d’une brûlante actualité !

Je ne suis ni donneur de leçons, ni calotin, ni « cul-béni », mais, qu’on le veuille ou non, notre civilisation s’est construite sur le décalogue. Les dix commandements de l’Eglise sont à l’origine de nos lois et de cet « Ordre social-chrétien » cher à La Tour du Pin (4) et qui est la base du Catholicisme social. Saint Vincent de Paul n’a pas attendu Kouchner ou l’abbé Pierre pour venir en aide aux plus démunis. D’ailleurs ceux-là confondent allégrement la « redistribution socialiste » avec la charité.

Si une monarchie n’est plus possible en France, alors disons que je suis – comme l’était le géniteur de Charles De Gaulle – « un monarchiste de regrets ». Mais comme les regrets, fussent-ils éternels, ne servent à rien, je garde l’espoir qu’un jour – que je ne connaitrai sans doute pas ? – la France redevienne « catholique et royale ». Après tout, il n’est pas interdit de rêver !

Notes :

1)- « Sire » de Jean Raspail ; Éditions de Fallois ; 1991.

2)- « Lettre ouverte aux Catholiques perplexes » de Monseigneur Marcel Lefebvre ; Albin Michel ; 1985.

3)- Le code de la chasse punit sévèrement celui qui tuera une hase (lièvre femelle) pleine mais tuer le petit homme à naître est parfaitement légal ! (Et avec le COVID, jusqu’au jour de l’accouchement-NDLR)

4)- « Vers un ordre social-chrétien » de La Tour du Pin ; Réédition Trident ; 1987.

Faites connaitre notre site, partagez !