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D’après Breizh-info.com

 

Tribune libre rédigée par Bernard Wittman, historien, spécialiste de l’Alsace qui réagit à l’élection d’Emmanuel Macron

Aucun des candidats n’a dénoncé le colonialisme intérieur

        Ça y est ! L’investiture d’Emmanuel Macron ce dimanche marquera la fin du dernier grand psychodrame français pour l’élection du prochain monarque républicain. Elle fut marquée par la sidérante percée du FN et l’élection d’Emmanuel Macron, un homme du système et des banques simplement revêtu d’habits neufs pour donner l’illusion du changement… mais qui a néanmoins l’avantage d’être un europhile sincère.

        Une élection pour rien, puisqu’au final rien ne changera, prenons-en le pari. En effet, ni le libéralisme mondialiste de Macron, ni l’enfermement nationaliste exacerbé de Marine ne peuvent être de nature à freiner le lent mais inéluctable dépérissement de la France dont les causes principales sont à chercher dans son idéologie nationale. Une idéologie fondée sur une vision totalitariste du réel, incapable d’incarner la démocratie et qui, de ce fait, finit par ne produire que des injustices et du ressentiment !

        En effet, durant toute la campagne du 1er et du 2e tour, aucun des candidats n’a clairement identifié les maux qui rongent le pays au plus profond jusqu’à l’entraîner dans un inévitable déclin :

– aucun n’a condamné le fonctionnement des institutions et rejeté le jacobinisme avec sa logique centralisatrice parisienne qui condamne les peuples allogènes à l’obéissance et à l’agenouillement permanents;

–   aucun n’a dénoncé le colonialisme intérieur qui étouffe, vampirise et pompe l’énergie des régions et que dénonce avec force le philosophe Michel Onfray dans son dernier ouvrage titré : « Décoloniser les provinces » ;

–  aucun d’entre eux n’a dénoncé le déficit démocratique chronique dont souffre ce pays.  Le partage du pouvoir et la démocratie de proximité ne peuvent en effet s’exercer qu’à travers des parlements régionaux dotés de pouvoirs législatifs ;

–  enfin, pas un seul ne s’est engagé, s’il était élu, à œuvrer à la reconnaissance des langues régionales, à leur enseignement ou à la ratification de la charte européennes des langues…

        Au final, le seul choix qui s’offrait aux peuples allogènes de l’Hexagone se résumait à voter pour un jacobin de gauche ou un jacobin de droite, tous les deux étant partisans du pouvoir centralisateur. Ainsi le vote se limitait à choisir entre la schlague ou la chicotte !

L’Alsace n’a pas échappé à cette mascarade électorale, à ce “Kàsperletheàter”

        Elle n’a pas échappé à cette foire quinquennale aux promesses, dont on sait par expérience qu’elles ne sont jamais tenues. Chaque candidat se présentait comme le représentant des aspirations du « peuple français » !! Or tous ont superbement ignoré tant les récriminations du peuple alsacien – écœuré par l’effacement de la région Alsace décidé à Paris sans consultation de la population – que ses aspirations au respect et à la responsabilisation.

        Infantilisé par l’oligarchie parisienne, aidé en cela par la servilité affligeante de ses « Handlanger » locaux, le peuple alsacien ne peut décider pour lui-même : on lui inculque qu’il est incapable d’opérer ses propres choix et que courber l’échine est sa position naturelle !

        Aux yeux de tous, il apparaissait clairement que l’Alsace était au rang du dernier de leurs soucis. De toute façon, étant ultra-minoritaires, dans ce système politique français injuste, totalement verrouillé et obstinément fermé à la proportionnelle, les Alsaciens en sont toujours réduits à devoir supporter les maîtres que d’autres, majoritaires dans le pays, leur imposent par leur vote.

        Les Alsaciens ne sont donc rien d’autre que des citoyens asservis : dans le système français, leur destinée est de subir éternellement les diktats de Paris élaborés par une petite clique de tyranneaux jacobins, tantôt de gauche, tantôt de droite, qui se relaient au pouvoir et décident et pensent à leur place !

        A présent, de plus en plus nombreux sont les Alsaciens qui rêvent d’en finir avec cette servitude. Ils sont de plus en plus nombreux à ne plus rien espérer de cette République vermoulue, laminée par les affaires et les scandales politico-financiers qu’est aujourd’hui devenue la France. Le salut ne viendra pas d’elle ou de l’un quelconque de ses monarques républicains, « successeurs de Clovis » selon la formule de certains commentateurs des chaînes info, mais de leur propre détermination à faire le choix de l’émancipation, de la rupture.

        Pour eux, la France, avec son aristocratie d’élus coupés du peuple, son idéologie qui sent le rance et ses monarques républicains quasi divinisés qui entendent « incarner » le peuple, n’est plus la solution, elle est le problème ! Un problème que le vote ne pourra nullement résoudre : « Voter aujourd’hui, c’est choisir les modalité de son aliénation ; on ne peut pas choisir entre la peste et le choléra », constate Michel Onfray[1] !

        Dans cette configuration, il est évident qu’aller voter ne pouvait que contribuer à maintenir au pouvoir une caste de profiteurs politiques qui font la loi et à légitimer un système dont l’aboutissement obligé n’est rien d’autre qu’une servitude volontaire : « Elections, piège à c… », scandaient les étudiants contestataires en mai 1968 ! Et puis, pour les Alsaciens, à quoi bon voter pour des candidats restés sourds à leurs doléances et qui ignorent jusqu’à l’existence même d’un peuple alsacien doté de droits reconnus par nombre de textes internationaux.

Les élections législatives vont suivre

        Et déjà, comme à l’accoutumée quand le bruit des gamelles se fait entendre, ça grenouille dur dans le marigot politique national et régional. Déjà on s’étripe pour l’attribution des circonscriptions : je te donne, tu me donnes…

        En Alsace, les vieux chevaux de la politique locale, ceux qui par le passé ont déjà échoué et qui ont trahi leur mandat, celui de nous défendre, sont à nouveau sur les rangs. Rien ne change et la politique à l’ancienne a encore de beaux jours devant elle !! Ce sont d’ailleurs les mêmes qui nous ont envoyé sur les roses avec notre pétition contre la fusion, pourtant forte de 115 000 signatures d’électeurs, et qui nous demandent à présent de défendre la démocratie. Une incohérence qui ne les choque même pas.

        Nombreux sont ceux qui flétrissent aujourd’hui le « système »… qui les a pourtant nourris depuis tant d’années. Mais ils savent aussi que la virulence de leurs critiques pourrait le cas échéant leur servir, une fois l’élection faite, pour mieux négocier  un poste ou quelques prébendes en échange de leur silence, voire de leur ralliement à ce même système qu’ils viennent pourtant de tellement vilipender ! Accros au pouvoir, ces lions se feront agneaux et rentreront très vite dans le rang. Les Alsaciens ont à ce propos leurs expériences !

        Alors que les vieux partis semblent imploser, ces élections seront pourtant une occasion unique pour les Alsaciens, après les bons scores d’Unser Land aux scrutins récents, de montrer leur opiniâtreté dans leur volonté d’émancipation et d’affranchissement de la mainmise parisienne ainsi que leur détermination dans la lutte pour l’autogestion régionale. Celles-ci passent évidemment par le vote en faveur des candidats protestataires alsaciens, pour le coup authentiquement « anti-système », qu’investira Unser Land.

        Le parti autonomiste devra s’imposer comme la machine de guerre qui convaincra nos concitoyens, rassemblera et structurera la lutte politique pour notre survie en tant que peuple. Les députés Unser Land qui seront élus à l’Assemblée seront la voix du refus alsacien, celle qui demandera des comptes à Marianne. Ils feront entendre enfin la voix du peuple alsacien : « Nein, mr mache einfach nemi met ! », sera leur credo.  « Soyez résolus de ne plus servir et vous serez libres », écrit La Boétie !

        Ce sera là l’enjeu principal des élections législatives à venir pour les autonomistes qui, pour l’emporter, devront entrer unis, sereins et déterminés dans l’arène électorale !

Alsace

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