Par Georges Malbrunot

 

Derrière la Turquie, l’Iran et le Qatar, la Malaisie accueille un forum destiné à répondre aux défis du monde islamique.

Plusieurs chefs d’États et de gouvernements de pays musulmans ont participé au sommet de Kuala Lumpur, parmi lesquels le président iranien Hassan Rohani, l’émir du Qatar cheikh Tamim, le président turc Recep Tayyip Erdogan et le premier ministre malaisien Mahathir Mohammad. AZRAF AFFANDI AZLAN/AFP.

C’est un sommet souvent vu comme anti saoudien. Une vingtaine de leaders du monde musulman, parmi lesquels les ennemis iranien, turc et qatarien de l’Arabie, se sont réunis pour trois jours à Kuala Lumpur dans la capitale malaisienne. Un rassemblement vivement critiqué par l’Organisation de la conférence islamique (OCI), basée dans le port saoudien de Djeddah et généralement considérée comme la voix du monde islamique.

Dans son discours d’ouverture, le premier ministre malaisien Mahathir Mohammad a annoncé la couleur en affirmant qu’il s’agissait de comprendre pourquoi l’islam et les pays musulmans étaient « en crise, sans espoir et indigne de cette grande religion ». Une pierre jetée dans le jardin de l’Arabie saoudite, gardienne des lieux saints musulmans, qui n’a pas honoré l’invitation qui lui avait été lancée d’assister à la conférence. Pas plus que la plupart des pays arabes, du Maghreb au Golfe en passant par le Levant, à l’exception du Qatar et d’Oman.

L’incapacité des pays musulmans à peser sur certaines crises

« Nous ne cherchons à marginaliser personne », a tenu à rassurer le premier ministre malaisien. Mais dans les couloirs de la conférence, les langues se déliaient souvent. « L’islam asiatique n’a rien à voir avec les chicayas interarabes », confie un visiteur de ce sommet. « Nous avons invité tous les pays musulmans », insistait-on à Kuala Lumpur.

La présence de la Turquie, de son allié arabe le Qatar, et de l’Iran interpelle cependant sur la volonté des organisateurs du sommet de créer un groupe alternatif aux Saoudiens. « Nous allons avoir l’opportunité de parler librement des sujets qui nous préoccupent : de l’islamophobie au terrorisme, en passant par nos divisions, nos luttes internes ravageant notre région, jusqu’au sectarisme et aux conflits ethniques », a affirmé Tayyip Recep Erdogan.

Le président turc et le premier ministre malaisien ont dénoncé l’incapacité des pays musulmans à peser sur certaines crises, en particulier le conflit israélo-palestinien, sur lequel l’Arabie a perdu la main. « Pourquoi n’avons-nous pas pu réaliser de progrès en faveur de la cause palestinienne, s’est demandé Erdogan, pourquoi ne pouvons-nous pas freiner l’exploitation de nos ressources, et pourquoi ne pouvons-nous pas mettre un terme à la fragmentation du monde musulman ?» Autant de lacunes facilement imputables, selon certains participants au sommet, à l’Arabie saoudite, censée diriger le monde musulman, en particulier sunnite, largement majoritaire au sein de l’islam.

Le Pakistan veut faire partie de la solution et non du problème

Riyad, qui redoute l’émergence à terme d’une contre Ligue islamique mondiale concurrente de la sienne et chapeautée par les pays asiatiques, s’est félicité de voir que son allié pakistanais a finalement cédé à ses pressions, refusant de se joindre au forum. « Le Pakistan veut faire partie de la solution et non du problème », a expliqué son ministre de l’Information Firdous Ashiq Awan, à Islamabad.

L’Arabie saoudite ne tenait pas à apparaître sur la photo de famille aux côtés de ses rivaux, Hassan Rohani, le président iranien, cheikh Tamim l’émir du Qatar et Recep Tayyip Erdogan, le président turc.

 Hassan Rohani a dénoncé, de son côté, « la domination du dollar américain et du système financier américain ». Un appel relayé par le Turc Erdogan : « Au lieu de commercer avec des devises étrangères, nous aimerions commercer avec des devises nationales », a-t-il expliqué.

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