Qu’est-ce que la subsidiarité ?

 

Le principe de Subsidiarité pose que l’autorité supérieure intervient dans les seuls cas où l’autorité inférieure est incapable de le faire. C’est ce que l’on appelle « le principe de compétence suffisante ».

 

Les décisions doivent être prises au plus bas niveau d’autorité publique compétente, ce qui implique la recherche du niveau hiérarchique pour tout type de responsabilité. C’est ainsi que la subsidiarité peut être descendante, c’est le cas de la décentralisation car il y a délégation des pouvoirs à un échelon inférieur. Elle peut être ascendante quand le pouvoir est délégué à une entité plus vaste, c’est le cas dans la fédération ou la supranationalité. Dans ce dernier cas, c’est l’échelon inférieur qui décide et qui doit répondre au problème posé. En ce sens on peut considérer la subsidiarité dans l’Union Européenne comme descendante.

C’est Aristote qui, dans « Les Politiques » a décrit la « Cité » comme une société organique composée d ‘une hiérarchie de groupes s’emboîtant à la manière des poupées russes dans un but d’auto-suffisance. Ce principe a été défendu chez les socialistes français par Proudhon, chez les libéraux par Locke et Stuart Mill et a été porté par la doctrine sociale de l’Église.

 

La subsidiarité : un principe d’organisation politique éminemment démocratique

 

Depuis les origines, les Peuples Européens se sont employés à réduire l’autorité au seul nécessaire. Les fédérations et confédérations de la Grèce ancienne s’organisaient déjà autour de l’idée suivante : chaque cité conserve sa liberté, son autonomie et ses droits propres, tandis que l’alliance n’est investie que des compétences nécessaires au bien-être et à la sécurité de l’ensemble.

L’application du principe de subsidiarité requiert partout les mêmes conditions anthropologiques et philosophiques : c’est la confiance dans la capacité des acteurs sociaux et dans leur souci de l’intérêt général. C’est l’intuition selon laquelle l’autorité n’est pas détentrice par nature de la compétence absolue quant à la qualification et quant à la réalisation de l’intérêt général et c’est la volonté d’autonomie et d’initiative des acteurs sociaux, ce qui suppose que ceux-ci n’aient pas été préalablement brisés par le totalitarisme ou infantilisés par un État paternaliste.

 

Union Européenne et subsidiarité

 

Le traité sur l’Union Européenne (art.5 paragraphe 3) stipule qu’ « en vertu du principe de subsidiarité, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l’Union intervient seulement si, et dans les mesures où, les objectifs de l’action envisagée ne peuvent être atteints de manière suffisante par les état membres », à tous les niveaux qu’ils soient national, régional ou local.

C’est dans l’organisation fédérale que le principe de subsidiarité trouve, sur le plan strictement politique, sa plus significative expression. La question fondamentale pour toute constitution fédérale est celle du partage des compétences, c’est-à-dire jusqu’à quel point les instances de proximité peuvent accomplir les tâches qui les concernent, et en déduire quelles tâches restent dévolues aux instances souveraines.

Le fédéralisme exclut toute concurrence d’instances souveraines au sein d’un même État . Il faudrait davantage parler d’autonomie, selon l’exemple de l’article 30 de la Loi Fondamentale Allemande : « l’exercice des pouvoirs publics et l’accomplissement des tâches incombant à l’État appartiennent aux Länders, sauf dispositions ou autorisation contraire de la présente Loi Fondamentale ». Et selon l’article 3 de la Constitution fédérale Suisse « les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n’est pas limitée par la constitution fédérale, et comme tels, ils exercent tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral ».

Par principe, toute compétence appartient donc là aux Länders et ici aux Cantons. C’est-à-dire que le pouvoir de régler les affaires du ressort de leur territoire ne réclame pas justification : il est évident en soi.

 

Une Europe fédérative face à une Europe rationaliste et centralisée

 

La tradition fédéraliste traduit une mentalité spécifique. On se souvient que les romantiques allemands opposaient une Europe « chrétienne, allemande et fédérative » à une Europe « rationaliste, française et centralisée ».

Face aux idéologies et théories globalisantes engendrées durant les deux derniers siècles, le principe de subsidiarité forme le pivot d’une pensée anti-systématique. Rejetant les recettes et les panacées – nationalisation, privatisation et relativisant les doctrines – libéralisme classique, socialisme- il réclame d’accorder davantage confiance au jugement particulier et à la décision politique.

Les deux grands systèmes politiques qui structurent la pensée politique depuis un siècle (le libéralisme et le socialisme) ont tous deux sacralisé une valeur relative : ici la liberté, là l’égalité. Autrement dit, ils ont fait l’erreur d’avoir attaché une importance excessive à une valeur unique, au détriment des autres car la liberté portée au pinacle, laisse se développer l’injustice et la misère ; l’égalité portée au pinacle devient fossoyeuse des libertés.

 Subsidiarité en république française

 

Si le 15 octobre 1985 le Conseil de l’Europe a ouvert à la signature le principe de subsidiarité dans la charte européenne de l’autonomie locale, concernant la libre administration, la France a tergiversé pour ne signer que le 1er mai 2007. Ceci, parce que la France et sa République « une et indivisible » est l’État le plus centralisé d’Europe et qu’elle résiste à l’application de ce principe.

Pour exemple la charte (art. 5 concernant la création des régions) indique que « pour toute modification des limités territoriales, locales, les collectivités locales concernées doivent être consultées préalablement ». Or, les citoyens en 2014 ont été mis devant le fait accompli avec une Bretagne amputée de la Loire-Atlantique, une Alsace engloutie, une Auvergne expatriée…

En droit, et selon le principe de subsidiarité, les décisions doivent être prises par l’instance la plus proche. Or, le droit communautaire prime sur le droit national, ce qui crée des conflits et des recours au niveau supérieur d’intervention, c’est à dire à la Cour de Justice des Communautés, ceci depuis l’arrêt Costa/Enel de 1964. Pour illustrer les cafouillages, Nicolas de Sadeleer dans « Droit et société » cite le droit de l’Environnement lequel relèverait de l’U.E mais le principe de la libre concurrence y fait obstacle en incitant à une prise en charge « au plus proche » des citoyens.

Pour illustration, on se souvient des affaires de l’aéroport de Notre Dame des Landes ou bien du barrage de Sivens qui d’affaires départementales ou régionales ont atterri sur la table du Conseil des ministres (voire de l’U.E). L’ex président Hollande a manqué un avion, par défaut de signalisation de l’aéroport de Fréjorgues, sur l’autoroute. Il s’est retrouvé perdu, venant de Narbonne, au péage de Lunel. Le Président de l’agglomération Philippe Saurel a indiqué, avec un brin d’énervement, que le problème était connu depuis plusieurs années et que la question serait réglée au plus haut niveau de la République).

Chantal Delsol, dans un article du Figaro en date du 31 mars 2005 remarque : « le principe de subsidiarité a été transformé en principe d’efficacité, c’est-à-dire en un principe jacobin, donc retourné en son contraire ». Dans l’Europe de Bruxelles, où une bureaucratie centralisatrice tend à tout réglementer par le moyen de ses directives, l’autorité supérieure intervient chaque fois qu’elle s’estime capable de le faire, avec comme résultat que la Commission décide de tout parce qu’elle se juge omni-compétente. Dans ces conditions, l’autorité que conservent les échelons inférieurs n’est jamais qu’une autorité déléguée, une subsidiarité descendante.

Mayotte est département français depuis le 28 mars 2003. Sophie Blanchy et Yves Moatty font observer que cette départementalisation a vidé de son contenu les prérogatives du droit civil local « indigène » reconnu par l’article 75 de la constitution et constitutif de l’identité Mahoraise. Ceci a créé une instabilité juridique dont les récents mouvements sociaux ont été une illustration. Ceci d’autant que la transition juridique n’avait pas été préparée et que l’État français maintient le droit local dans les textes. Ce n’est pas le nouveau président, tout jupitérien qu’il soit, qui va stabiliser la situation avec la multiplication des visas « comoriens ».

 

 

Conclusion

 

Le principe de subsidiarité en appelle à la société civile pour l’accomplissement des tâches d’intérêt général. Or, parce qu’il est en crise profonde l’État, devenu providentiel, est anémié et en voie de dislocation. Il devient un risque majeur pour notre Civilisation. L’État en France abandonne une à une ses tâches d’intérêt général au lieu de les redéfinir.

L’État Jacobin en France n’est pas devenu Girondin : il est simplement en cessation de paiement. Parce qu’il est aujourd’hui démissionnaire et non porteur d’un projet politique, il abandonne derrière lui un désordre qui n’a rien à envier à celui de l’Ultra-libéralisme.

Le principe de subsidiarité suppose une redéfinition des rapports entre L’État et les citoyens. La LIGUE du MIDI, très attachée aux libertés locales face aux diktats des commissaires européens défend les modes de vie locaux, les traditions, le patrimoine culturel. Elle promeut une citoyenneté de participation qui doit se doubler d’une citoyenneté d’action. Agir ensemble ne constitue pas une condition d’appartenance, mais une capacité que les instances publiques se chargent de promouvoir et de seconder là où elle apparaît.

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